Tenir bon
Le vent pile poil dans le nez, Cheminées Poujoulat creuse son sillon au cœur du Golfe de Gascogne. En début d’après-midi, il est très à l’ouest, à la latitude de La Rochelle, tandis que les premiers bateaux de la classe ultime croisent au large des côtes du Portugal, voire au-delà, pour Groupama, l’éclaireur de cette Route du Rhum-La Banque Postale.
C’est dire qu’il y a plusieurs courses dans cette épreuve et que les skippers des Class40 devront livrer une lutte bien plus longue et autrement plus pénible que celles de ces bolides lâchés sur l’Atlantique. Et comme si la tâche n’était pas déjà assez compliquée, Stamm, le roc, a choisi de partir dans le dur : au nord ouest, là où ça mouille plus, ça tape plus, c’est plus penché, c’est plus froid, c’est plus inconfortable. Certes il n’est pas seul, cette Class40 est une véritable armada, mais il est en tête et la pression n’en est que plus forte. Cheminées Poujoulat tire des bords, au près, et Bernard est à la manœuvre avec la rage qu’on lui connaît. «Je suis au maximum dessus» lâchait-il à la vacation organisée en direct de la Maison de Bretagne à Paris tout à l’heure. L’organisation de la course y est installée, c’est au 8, rue de l’arrivée, justement…
Du long terme
Les jeux ne sont pas faits, bien entendu, mais ces premiers jours de course auront déjà permis de dévoiler, un peu, les cartes des adversaires dans cette classe où il demeurait quelques inconnus, notamment pour Bernard qui vient du 60 pieds Imoca. Son passage en série Figaro cette année, sur la Transat Ag2r, puis sur la Solitaire apporte actuellement ses fruits et c’est exactement ce que le skipper de Cheminées Poujoulat en attendait avec cette régate au contact, ou presque.
Bernard a choisi le contournement ‘du bazar’, comme il dit en parlant de l’anticyclone, au plus court. «C’est mouvementé, il y a 25 nœuds de vent ça va forcir encore. Il n’y a pas grand chose à faire au sud je crois, mais Troussel semble bien placé à court terme, il faudra voir sur le long terme ». Nicolas Troussel, positionné quatrième a midi, plongeait effectivement au sud. Le marin de la baie de Morlaix fait probablement partie des plus dangereux adversaires de Bernard, c’est donc avec la plus grande attention que Stamm observe sa trajectoire, d’autant plus que celui-ci devient de plus en plus incontrôlable. Au classement de midi, les deux poursuivants de Cheminées Poujoulat, Thomas Ruyant (à 1,6 milles) et Samuel Manuard (à 7,2 milles) étaient eux, sur la même trajectoire que Bernard, avant que celui-ci ne remette le clignotant à droite, encore plus à l’ouest. Il confirme ainsi son investissement sur le long terme, même si «c’est vraiment tentant de virer pour ne plus avoir le vent en plein dans le nez » confiait-il ce matin, avouant aussi une difficulté à se reposer.