Le passage du détroit de Gibraltar est toujours un endroit un peu redouté des marins. Le trafic y est dense, les courants plus que significatifs et les vents parfois tordus. Et si tous les paramètres sont réunis dans le mauvais sens, la traversée de ce passage maritime entre l'océan Atlantique et la mer Méditerranée, large de 14,4 kilomètres, peut rapidement virer au casse-tête, voire à l’angoisse. La bonne nouvelle c’est qu’hier, pour le duo de Cheminées Poujoulat, les éléments étaient presque tous réussis pour que ça se passe au mieux, comme l’a expliqué le skipper suisse, ce matin, par téléphone satellite : « Nous avons eu des orages terribles mais au moins, ça a bombardé ! Le vent est monté assez vite et nous avons conservé de l’air assez longtemps alors que les fichiers météo nous annonçaient que ça tombe à la pointe ouest du Maroc. Au final, ça ne s’est cassé la figure qu’après Gibraltar », a commenté Bernard, spécifiant que le rocher qui surplombe la ville, un monolithe calcaire culminant à 426 mètres au dessus du niveau de la mer, a purement et simplement « cassé » le vent.
Les 2/3 du détroit pleine balle
« Nous avons tout de même réussi à avaler les deux tiers du détroit à vitesse grand V et ça, c’est bien. Ca a été d’autant plus facile que nous étions dans le bon timing par rapport aux courants et vu les coefficients de marée de ces derniers jours, c’était franchement pas plus mal », s’est satisfait le navigateur avouant tout de même avoir ensuite un peu bataillé pour s’extraire des vents faibles le long de la côte méridionale de la péninsule ibérique, la nuit dernière. « Avec Jean, nous avons un peu lutté pour trouver les bonnes risées et ne pas bêtement nous faire scotcher au moment de la renverse. Le point positif, c’est que nous avons plutôt bien réussi à nous en sortir en jouant avec deux ou trois veines de courants. A présent, nous avons retrouvé de la pression dans nos voiles puisque ça re-souffle entre 17 et 21 nœuds. La mer Méditerranée dans toute sa splendeur ! », a souligné le skipper de Cheminées Poujoulat qui poursuit sa remontée vers Barcelone au près, et qui se gratte doucement la tête pour savoir de quelle façon négocier la dépression actuellement plantée sur sa trajectoire.
Encore plusieurs embûches sur la route
« Elle est devant nous même si elle n’est pas visible sur les cartes. Elle est positionnée entre le sud d’Ibiza et les côtes Algériennes. Pour l’heure, il est difficile de dire comment nous allons la gérer. Tout va, en fait, dépendre de la façon dont elle va évoluer mais comme il n’y a pas beaucoup de gradients, c’est compliqué à estimer. Une chose est certaine, il va falloir être opportuniste ! », a détaillé le leader de la Barcelona World Race qui va donc devoir faire un choix dans les heures qui viennent. « Comme il y a une incertitude sur ce que nous allons faire, pour l’instant nous avançons au près serré. C’est pour cette raison que nous n’avançons pas très vite », a-t-il ajouté en rappelant que l’erreur à ne pas faire maintenant que Jean et lui sont en Méditerranée, c’est d’imaginer qu’ils sont arrivés. « Ce serait comme penser qu’une fois qu’on a franchi le cap Horn, on est sorti du Grand Sud. C’est faux ! Et c’est d’autant plus inexact que dans notre cas, nous aurons potentiellement un bon coup de vent à affronter à hauteur de Valence. A cet endroit, il est très possible que nous nous retrouvions au près dans 35 nœuds de vent. Il faudra donc faire gaffe. C’est vrai que nous nous rapprochons mais avant de franchir la ligne d’arrivée, il nous reste encore quelques étapes à franchir », a conclu Bernard Stamm, dont l’ETA (Estimation d’heure d’arrivée) est annoncée entre 9 heures et 12 heures, ce mercredi 25 mars.